29.12.07

Si loin si proche

J'avais passé une partie de mon été à lire l'oeuvre de Vernon Sullivan et j'avais trouvé cela drôle et méchant -au final, le souvenir le plus marquant qu'il m'en reste est une réflexion que se fait le narrateur d'un de ces romans (lequel ?) : pour un homme, ce n'est pas très pratique de courir nu sur la plage !!!

J'abordais sans enthousiasme cette deuxième année de seconde.

Aussi, quand, lors du premier cours de français, la prof, qui parlait de Boris Vian et mentionnait qu'il avait écrit des romans policiers sous un autre nom fut incapable de citer ce pseudonyme, je levai les yeux au ciel, avec tout le mépris sans pitié dont sont capables les adolescents et je répondis à sa place.

Après le troisième cours, cette prof disparut. Je ne sais plus pourquoi. En tout cas, nous ne l'avons plus jamais revue.
Elle fut remplacée par une jeune maître auxilliaire et, enfin, l'année put commencer.

Cette remplaçante fut à peu près la seule raison de ne pas complètement renier cette année pénible.

Je lui dois un fou rire à la lecture de l'incipit du Voyage au bout de la nuit et, surtout, la rencontre avec un texte fondateur de ma vie de lectrice.

Elle nous fit, en effet, travailler sur un court extrait dont la beauté me bouleversa. Cette langue était parfaite. L'ambiance que bâtissaient ces quelques lignes donnait envie d'en savoir plus et, comme je l'interrogeais, elle prit un moment pour nous parler de l'auteur.

Par la suite, j'achetai le livre. Comme tous ceux que publiait José Corti, il n'était pas massicoté et en découper les pages fit de cet objet une véritable propriété privée.

Mon exemplaire d'Au château d'Argol a perdu sa belle couleur originelle. Je l'ai lu, relu et encore. Et je le relirais encore volontiers. (Mais pour quelle raison n'a-t-il pas fait le voyage jusqu'ici dans ma valise ???)

Et quand nous avons emménagé, il a fait partie des doublons de cette bibliothèque qui ne fut jamais commune -et constater que nous l'avions chacun en notre possession avait été la confirmation que nous ne nous trompions pas... (Plus tard, Bach et Pärt me procurèrent la même certitude)

C'est souvent que mes visites sans rendez-vous chez le coiffeur sont prétextes à la voir de manière tout aussi impromptue.
Aujourd'hui, ça a été autour d'un thé vert sous la pendule antique.
(Et quand je lui ai dit que ça faisait un an aujourd'hui, elle a hésité à me croire. Elle pensait que c'était beaucoup plus ancien !)
Je suis ressortie plus légère et, dans les ruelles autour de Takadanobaba, il y avait, avec moi, la voix de Julien Gracq.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

si loin si proche, c'est aussi le souvenir anniversaire des feuilles écornées d'automne, découvertes dans ce pays au nom étrange et qui avait aussi la saveur d'une certitude.

Pays de Neige.