21.1.08

Shinjuku-Normandie aller-retour


Il n'y a jamais de place assise dans le rapide express. Le voyage commence à travers les rizières et, ce week end, il a neigé sur les montagnes.
Le temps de mon trajet est le même que celui de l'émission et le train entre en gare de Shinjuku alors que Caroline Champetier achève son récit d'un tournage en Normandie. Cela m'avait, bien sûr, demandé nettement moins d'efforts d'imagination lorsque, il y a quelques semaines, elle avait décrit les travellings du dernier film de Carax, sur les trottoirs de Ginza.
"Le ciel se chargeait lui aussi et, du flou au net, du net au flou, nous passons des animaux aux nuages dans la même excitation que peut produire la découverte d'une forme. Cette forme que Boudin découvrait un siècle plus tôt avec ses outils à lui.
En très gros plan, sur le flan tacheté d'une vache blanche à taches noires, nous étions dans les mêmes formes que dans le ciel et lorsque nous remontions l'optique vers le haut, c'était cent vaches qui piétinaient tête en haut tête en bas dans un abandon total de la perspective et de la profondeur, tout étant ramené à la surface de l'image. L'impressionnisme touché, vécu, filmé."

Et, comme un message sur mon téléphone m'a offert une heure de libre, je vais me jucher sur une chaise haute.

Dans ce lieu où les onigiris sont également à emporter, il y a cette femme qui respire à peine entre deux inspirations de fumée et encore moins entre deux cigarettes qu'elle allume à la suite -ce qu'elle fait quatre fois- pendant que sa mère, qui a abaissé son masque, fait du bruit avec sa paille.

Et le sol tremble au passage de chaque train.

Il y a cette autre à qui il n'a fallu que trois bouchées pour avaler cent grammes de riz.
Il y a celle qui fait des grimaces devant son miroir comme dans sa salle de bain pour remaquiller ses pommettes.

Et je suis, quant à moi, parfaitement immobile.

Il y a celle qui est jolie sans qu'on sache dire pourquoi et dont les yeux continuent à rire pendant qu'elle a la bouche pleine.

Et la foule, sans arrêt, derrière la vitre.

En la voyant déposer un verre de blanc sur sa table, je réalise qu'il est l'heure de l'apéritif et que c'est l'heure de partir.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Et il y a celle qui épie le poids des montagnes, qui défilent comme un film qui s’imposent sur le fil, muet, s’impriment. D’abord, les autres gares puis encore une autre courbe qui tombe sur un toit, ou au centre d’un parking. Et il y a l’auteure d’ici qui s’appuie sur le jour, et le repousse jusqu’ici. Tous les jours, il y a cette page qui s’ajoute à un jour ; il y a les lignes, il y a les courbes, dures et mousses, à coté des douves ou dans le champ des montagnes. C’est doux d’être tous les jours ici à coté des courbes, des douves et des montagnes. Oui, il est doux le mot qui mène comme un train ou un chant au-delà des gares et des campagnes.

Pays de Neige.