31.3.08

Tomare (stop)


Je ne peux pas lui dire d'arrêter.
On ne demande pas aux gens d'arrêter d'être ce qu'ils sont.
Ni aux personnes qu'on aime puisque c'est ainsi qu'on les aime.
Ni aux autres puisque ce qu'elles sont ne nous regarde pas, ne nous importe pas.
Je ne peux pas lui dire d'arrêter parce que je reconnais si souvent dans ses virevoltes -un pas en avant, trois pas en arrière- mes propres incertitudes. D'autres indécisions pour d'autres raisons mais qui nous rendent si semblablement en lutte.
On pourrait en rire -on en soupire, des fois- à nous voir nous débattre dans ces interrogations, ces questions sans fin qui nous conduisent toujours -toujours, vraiment- à la même conclusion : la vie est belle !
La nôtre peut l'être, en tout cas !
Surtout quand on peut tourner le visage vers un rayon de soleil et qu'on connait l'adresse où manger les meilleurs onigiris du monde.
Il s'agit, finalement, d'être convaincues que le terme de nos atermoiements nous mène là où nous avons raison d'être.

Qu'il était bon de dévier du programme initial, d'abandonner ce projet de travail et de savourer chaque instant de ce temps précieusement libre autant que s'il s'agissait d'un cheese cake à la patate douce .
Wonderful day, as he says.

30.3.08

Les jours gris


Les jours gris, je découpe les heures au cutter.

Et j'encage les motifs minuscules -des carrefours, des fleurs- dans des carnets à spirales.

J'ajoute à ma liste de courses -passer à Sugamo, acheter des pommes et des tomates- quelques pellicules pour les instantanés à venir.

Et je sais à l'avance que le sous-sol bruyant de Bic Camera où j'irai les chercher sera échangé, plus tard, contre le calme de ces journées, aux théières patientes -thés fumés et noirs- et aux musiques familières -Arvo Pärt et Haendel-

Aujourd'hui comme hier, je vis ma vie indépendante en pensant à la sienne encore reliée à des tubes, en pensant à la phrase de Jean-Pierre Georges :"Il ne me viendrait pas à l'idée de mourir". Je suis sûre qu'à lui non plus.

29.3.08

Les jours fleuris


"Il y a quelques années, Kojima Takashi était déjà venu une fois se joindre aux professeurs, juste avant la rentrée, au moment des cerisiers. Ce qu'il avait vu en restant jusqu'à la fin, c'était précisément le grand ménage auquel s'étaient livrés les enseignants une fois la fête finie. Ceux qui, non contents de ramasser les papiers, les mettaient dans des sacs en plastique qu'ils avaient apportés, exprès. Ceux qui, après avoir regroupé les bouteilles vides, les entassaient dans la camionnette du marchand de saké qui connaissait l'école (je suis certain qu'ils lui avaient demandé de venir à cette heure précise, c'était prévu a ajouté Kojima). Ceux qui répartissaient équitablement entre les professeurs qui aimaient le saké les bouteilles encore à moitié pleines. Ceux qui aplanissaient le sol inégal du remblai à l'aide du pilon qu'on réservait à la cour de l'école. Ceux qui rassemblaient les objets perdus et les mettaient dans des cartons. Sans hésitation, prestement, les professeurs s'étaient mis au travail comme un bataillon bien entraîné. En moins d'un quart d'heure, les vestiges de la fête, qui l'instant d'avant battait son plein, avaient disparu sans laisser la moindre trace.
"Moi, j'étais tellement sidéré que je suis resté planté les bras ballants, sans rien faire, à les regarder."
Hiromi Kawakami. Les années douces.

28.3.08

Jalouse


Tous les matins, près de la rivière, ils nettoient leur terrain, le délimitent puis, pendant une paire d'heures, jouent au croquet.
Et il m'arrive de transporter jusque là mon petit déjeuner.
Toute l'année, ma vie est nomade. Mais, plus encore à l'arrivée des beaux jours, mon sac s'alourdit de tout ce qui est nécessaire aux plans ou aux imprévus de la journée.
Je sors rarement sans un thermos de thé, jamais sans livre, sans écharpe, sans musique ou radio, sans carnets, sans appareil photo. Et, parfois, ce sont des verres à pied ou des flûtes à champagne et des bougies que j'emporte avec moi.
Je perfectionne mon arsenal, j'organise mes improvisations, je me prépare à toutes les éventualités...
Mais rien à faire...
Je ne suis, décidément, pas à leur hauteur...

27.3.08

C'est jeudi !


Au Japon, c'est le printemps ! On le reconnait à ses fleurs et c'est ici que j'en envoie une pleine brassée à Madame Gâ.
(Pour cause d'averses de spam, les commentaires sont fermés sur Nos jeudis... n'hésitez pas à écrire ici...)

26.3.08

Bande passante

Aux paysages urbains de mon quotidien, se superpose une bande son.
En entendant, sur les radios, les émissions de dédicaces, je me suis toujours demandée s'il y avait quelqu'un pour les entendre.
En faire une à mon tour est un peu le moyen de le savoir...

1-E., Thomas, Louise et Médor étaient restés. Nous étions sorties. A l'Aéronef, en entendant les premières notes de cette chanson, j'avais souri et, dans le noir, j'avais dit à Odilon, que c'était celle que je préférais.

2-Le bleu immuable du ciel, l'appartement tranquille. Et, seul enjeu de la matinée : choisir la meilleure nuance de rouge pour nos lèvres. Chez Ga, cette musique presque trop douce accompagnait joliment nos futilités.

3-Pays de Neige, il me semble qu'à toi aussi, le vin réjouit le coeur...

4-"Tu veux quelque chose de chaud ?" est la phrase rituelle de mon arrivée. Et il s'agit toujours d'un thé. Ensuite, pendant que je m'installe dans la cuisine, il s'occupe de la musique. Et, comme nous parlons beaucoup, je n'entends jamais le reste du disque.

5-Dès les premiers mots, j'ai eu envie de joindre la petite mélodie à l'un des innombrables mails quotidiens que j'envoie à ma fée Clochette. Un hymne pour tous les jours moins faciles que les autres ou, simplement, suivre à vélo la Meiji dori...

6-Quand je les ai vus faire de la radio, j'ai mieux compris pourquoi le générique était long. Il y avait, dans le studio, une ambiance qui s'installait, une concentration sans trac. Le générique a changé mais l'émission continue. Nikola et Carole lisent toujours autant.

7-Vous êtes nombreux à qui me font penser ces premières notes quand elles résonnent... Tellement nombreux que je ne peux pas tous vous nommer. Mais vous le savez.

8-Agnès, Jenny et bien d'autres apprennent le japonais loin d'ici... Voici, à leur attention, un petit exercice de diction... Histoire de parler japonais... avec l'accent... africain !

9-A tous ceux qui se sont, un dimanche matin, réveillés chez nous, chez moi... Est-ce que cet air rappelle des souvenirs de petits déjeuners ?

10-Parce que je sais que le choix de son prénom a été inspiré par Laurie Anderson, je pense toujours à ma cousine quand je l'écoute chanter. Mais aussi lorsque je les écoute, eux. Parce qu'elle les aime, elle aussi.

11-Ce soir-là à Paris, en tête à tête avec Sylvain, le retrouvant par surprise, le retrouvant avec tant de plaisir, renouant avec notre histoire... Je ne me suis jamais autant félicitée d'avoir cité cette chanson lorsqu'il était en 1ère ES et de l'avoir, ainsi, tellement marqué qu'il ait eu envie de m'aborder dans la rue.

12-Aux beaux jours, la porte était ouverte sur le soleil de la cour. Et les chats mélangeaient leurs poils noirs et blancs en se courant après. Chez Sébastien et Sandrine, il y avait toujours de la musique et souvent un changement dans la déco. Et j'imagine bien cet air-là nous accueillant.

13-Maman, est-ce que cette chanson te donne envie de danser, à toi aussi ?!!!

14-Au moment du choix des musiques pour les bals littéraires, j'essayais toujours de caser celle-là. Savourant à l'avance la possibilité de la danser sur le parquet de la salle des fêtes de Fives. Il me regardait avec indulgence. On savait que lui essaierait de glisser "I put a spell on you" dans la programmation !
Joël est le seul à ne pas pouvoir écouter la radio.
Quant aux autres...

Quant aux autres, vous pouvez cliquer sur ma "radio dédicaces" pour découvrir cette bande son...

25.3.08

Tuesday self portrait (2016)

Tokyo promeut par voie d'affiches sa candidature pour les Jeux Olympiques de 2016.

Serai-je encore dans les ruelles de Yanaka, en 2016 ?

Qui serai-je en 2016 ?

J'aime bien ne pas le savoir.

24.3.08

Les Bolo de Mina

"Le prix Nobel de littérature, monsieur Kawabata Yasunari, entre parenthèses soixante-douze ans, s'est suicidé la nuit du 16 en portant un tuyau de gaz à sa bouche, sur son lieu de travail, au troisième étage du Marina Mansion à Zushi. On n'a pas découvert de testament, et beaucoup de gens de son entourage restent pensifs à l'idée de la caude de ce suicide, mais on dit que depuis son opération de l'appendicite le mois dernier, sa santé laissait à désirer..."
Tout le monde était à sa place, à l'écoute de la lecture de Mina. Grand-mère Rosa avait joint les mains sur sa poitrine, madame Yonda tartinait avec ardeur des morceaux de baguette avec de la confiture de fraises, ma tante brassait son thé. Le soleil matinal qui entrait par les fenêtres orientées à l'est éclairait le profil de Mina. Elle n'avait pas buté une seule fois et lisait correctement tous les caractères chinois, même les plus difficiles.
-"... Le corps a été transféré au cours de la nuit, aux premières heures du 17, dans sa maison de Kamakura où l'ont accueilli sa famille, sa gourvernante et les gens du voisinage."
Lorsque Mina eut terminé sa lecture, tout le monde laissa échapper un soupir de tristesse.
-Ce monsieur Kawabata Yasunari, c'est un ami de la famille ? questionnai-je à la cantonade.
-Non, répondit grand-mère Rosa en décroisant ses mains.
-C'est que vous avez toutes tellement l'air sous le choc...
-Ce n'est pas une connaissance. Nous ne l'avons jamais rencontré. Mais monsieur Kawabata, c'est un écrivain, n'est-ce pas ? Quelqu'un qui écrit des livres. Même ici, il y a des livres de monsieur Kawabata. Ce n'est pas une connaissance mais nous avons un lien. Monsieur Kawabata a écrit des livres, qui sont ici. Ces livres, tout le monde les lit. C'est pourquoi nous sommes tristes.
Mina replia soigneusement le journal et le posa sur la table. Elles sont toutes restées un moment tête basse, comme si elles respectaient une minute de silence, les yeux baissés sur leur assiette, sans se préoccuper des oeufs au bacon qui refroidissaient."
Yoko Ogawa. La marche de Mina.

Vivre au Japon me permet de picorer des Bolo -comme Mina et sa cousine- en lisant le dernier roman de Yoko Ogawa.

23.3.08

La mémoire de la peau

Ce qui change, c'est :

-l'emplacement de la soie grise que j'étends sur l'herbe rase : non loin de la route inaccessible aux voitures.

-l'auteur et le titre du livre : Le théoriste d'Yves Pagès.
"Les bousculades, bris de vitrines, pillages, début d'incendie qui allaient s'en suivre m'ont évidemment marqué, mais c'était peu de choses, confronté à ma première expérience physique d'une insurrection verbale.
Tous ces mots majuscules, se moquant d'eux-mêmes pour mieux prendre au sérieux une colère à laquelle, sans en comprendre toutes les subtilités, j'adhérais épidermiquement comme on dit du motif d'un Malabar qui, humecté d'un peu de salive, vous colle à la peau quelques heures durant. Le moindre slogan barbouillé par ces furies décalcomaniaques me faisait l'effet d'un tatouage intime. Elles avaient sûrement d'autres idées en tête, mais pour moi, c'était le frisson d'une nouveauté radicale : vider le trop-plein de sa tête directement sur les murs. Afficher ses pensées sur la voie publique, sans passer par la queue leu leu des petits caractères d'imprimerie qui, à force de respecter l'ordre des lignes, des paragraphes, des chapitres, transforment la lecture en file d'attente disciplinaire, et n'importe quel livre en coursive de prison."

-l'émission glissée dans l'iPod : Jeux d'épreuve sur France Culture.

-la couleur du thé qui ne refroidit pas : ambrée.

Pour le reste, tout est pareil.
Tout est toujours pareil, sous le soleil de Tokyo.

Et la peau, au fil des heures, se souvient de sa couleur des beaux jours.

22.3.08

"J'espère que vous menez une existence digne d'etre vécue"

Cette phrase trouvée au matin a fait écho aux mots de la veille. Chaque jour est une aventure et, aujourd'hui, il était bon de la faire débuter dans l'appartement ensoleillé où les enfants aiment les tartines et en redemandent pendant que je bois un thé.

A Jimbôcho, sortant de chez le bouquiniste, j'ai glissé les deux livres entre la bouteille thermos, l'onigiri au tarako et le drap de soie destinés au déjeuner sur l'herbe.

"Vivre, au fond, c'était s'arranger pour être le plus content possible. Et ce n'était pas si facile."
Les mots de Sagan sont à peine de minuscules leçons, pas des commandements.
A la fin de son roman, j'avais fait le tour de l'arbre pour en éviter l'ombre et j'ai souri de cette ineffable désinvolture, cette manière de se relever sans se froisser l'épaule :
"Mais enfin quoi ? J'étais une femme qui avait aimé un homme. C'était une histoire simple; il n'y avait pas de quoi faire des grimaces."

Tokyo est si facile à vivre quand il suffit de laisser passer les heures au soleil du palais impérial, ne garder qu'un tee shirt, fermer les yeux, pédaler sur les avenues.
Et, comme un autre samedi, rentrer par Sugamo, manger un tayaki. regarder les fleurs s'ouvrir, les lumières s'allumer et le jour tomber.

Mon existence est-elle digne d'être vécue ?
A l'issue de certaines journées, je pense que oui. Mais je sais que, le lendemain, tout est à recommencer. L'aventure continue.

21.3.08

"Te rappelles-tu de ?"

Comme des petits Poucets, nous parsemons de pierres blanches les pages de notre calendrier.
Tant de dates à célébrer -sans compter ce Noël en février-
Nos anniversaires ont des noms de régions : Chinon, Pauillac, Champagne...

Celui d'aujourd'hui porte un numéro en plus du nom de la saison qu'il inaugure.
Nous attendons rarement une année avant d'égrener les délicieux "dis, te rappelles-tu de ?". Mais cet anniversaire nous renvoie bien aux inconnus que nous étions l'un à l'autre l'an dernier avant que commence cette conversation que, contournant tous les obstacles, nous n'avons jamais interrompue.
Une conversation infinie.

20.3.08

C'est jeudi !


Rouge est la couleur du courrier.
Rouge est également la couleur de la boucle d'oreille de Madame Gâ qui m'envoie ici son humeur 80's du jour.

(Petit rappel des faits : pendant deux ans, nous nous sommes donné rendez-vous dans tout Tokyo, Ga et moi. Et c'était souvent le jeudi.
Après son retour en France, pour prolonger nos tête-à-têtes malgré la distance, et vous faire partager nos souvenirs, digressions et autres papotages, nous avons ouvert une boîte aux lettres commune baptisée "Nos jeudis". Si vous êtes lassés des factures et publicités qui constituent votre courrier, n'hésitez pas à aller lire le nôtre !!!)

19.3.08

Lettre ouverte

Jenny,
j'avais les cheveux longs quand je t'ai écrit depuis ce café souterrain et je t'ai cité les mots en exergue du livre de Javier Marias que je (re)lisais :
"Les livres que nous ne lisons pas sont pleins d'avertissements, jamais nous ne les connaitrons, ou ils viendront trop tard."

Et je t'ai parlé d'elles -la mère et la fille- silencieuses et concentrées -chacune absorbée de son côté- qui m'ont révélé à quel point l'activité que j'avais abandonnée pour t'écrire (m')était précieuse.

Moi qui étais en train de lire aussi, je les enviais presque !
Parce qu'il y a encore meilleur que de lire : c'est lire en même temps qu'un être cher.
Côte à côte. Chacun dans ses mots. Et, pourtant, tellement ensemble.

Je suis sûre que tu ne me démentiras pas.

Je t'embrasse.
Gwen.
(Et, alors, finalement, ce formulaire, tu l'as envoyé ???)

18.3.08

Tuesday self portrait


Elle a dit "Oh, c'est bien ! On dirait qu'il y a une photo de toi sur ma table !"

17.3.08

La mère

Il y a toujours des surprises dans la rue.
Aujourd'hui, à Shirokanedai, je croise cette maternité, comme en écho à celle d'hier.

Et, comme hier, c'est cette main qui est émouvante.

Cette main qui entoure l'enfant si évidemment. Si tendrement.

16.3.08

Les aventuriers


Je les reconnais bien là. Tout, avec eux, peut se changer en galères : acheter des couches, être à l'heure pour le train... Et puis non ! Ce sont juste des aventures !

Je les reconnais aussi dans leur fille. Anzu est tout à la fois tranquille, belle et espiègle. Et elle maîtrise déjà parfaitement l'art essentiel de la sieste dans les parcs au printemps.

15.3.08

Une vie à ma taille

Davantage qu'un mètre ruban, ce sont ses mains, quand elles m'attrapent par la taille, qui m'assurent que j'ai changé.

Le samedi midi, le parc est immobile, le bassin est dans l'axe du soleil et moi sur son bord.
La baguette de Kaiser répand sa farine sur la lettre de Londres (quelles nouvelles ! Quelles bonnes nouvelles !).

J'entends parler des bols préparés pour la cuisson de printemps, des couleurs floues et belles d'Angkor, des journaux intimes de nobles Japonaises du temps jadis, d'un appareil numérique passé au mode noir et blanc...
Ils m'exposent leurs passions qui me fascinent autant qu'elles me révèlent que je n'en ai aucune.

Parfois, j'essaie de m'imaginer en train de faire quelque chose -voir si l'imagination peut susciter l'envie, peut devenir moteur- : sauter en parachute, pratiquer la calligraphie, faire de la moto, prendre l'avion pour des destinations étrangères...

Mais non.

Parfois, je ne peux même pas m'imaginer et je sais, alors, que ça n'est pas pour moi : tirer à la carabine, danser le flamenco, lire des romans de Marc Levy...

Non, définitivement non !

Il n'est pas toujours simple de savoir quoi faire de cette liberté à perte de vue.

Il n'y a pas que mes vêtements qui flottent autour de moi mais aussi ma vie, un peu (surtout quand il n'est pas là).
Je n'ai aucune compétence en couture, pas de talent pour les retouches.
Alors, ce matin, j'ai racheté un jean à ma taille.
Pour ma vie, je ne sais pas.
Pour le moment, j'attends.
Je suis en équilibre sur le bord du bassin et j'attends.
Peut-être qu'un vendeur viendra, avec un mètre ruban.

14.3.08

XXI

En haut de l'avenue, dans le soleil frais de cette fin d'hiver, j'ai pensé que si je persistais à partir aussi tard de chez moi le mercredi matin, je ne tarderais pas à transpirer avant d'atteindre en me pressant l'autre bout d'Omotesando.

Le temps change. Le vent souffle souvent et il est encore un peu froid mais il joue avec les lampions roses accrochés dans les rues en prévision de la floraison des sakuras. Le soleil brille parfois assez fort pour permettre les pique-niques à midi.

En haut de l'avenue, dans le soleil frais de cette fin d'hiver, il était 8H38 et j'ai reçu son mail.
Seule éveillée dans la maison endormie, elle m'écrivait la tempête, la pluie, la nuit.

J'aime vivre dans ce siècle qui, grâce à un simple téléphone dans ma poche, me permet de connaître l'ubiquité, me donne l'impression d'être près de ma soeur dans la nuit pluvieuse de Normandie en même temps qu'à Tokyo, dans le matin ensoleillé.
(Parfois, l'ubiquité, c'est aussi partager ma glace au sakura...)

13.3.08

C'est jeudi !


C'est jeudi et, chaque jeudi, quelle que soit la couleur de la boîte aux lettres, c'est ici que j'écris à Madame Gâ...

12.3.08

Nouveauté

Il a raison, Emmanuel Kerad, quand il dit « une nouveauté musicale » pour désannoncer le dernier titre des Têtes Raides. Et, pourtant, à mes oreilles, ce groupe n’est plus capable de nouveauté : quelle que soit la mélodie, quelles que soient les paroles que chante cette voix, j’ai l’impression de toujours entendre les mêmes chansons, celles que, au début des années 90, j’ai usées jusqu’à la corde, jusqu’à ne plus pouvoir les écouter ni même les entendre. Jusqu’à ne plus pouvoir écouter quoi que ce soit de ce groupe-là.
Ainsi, cette nouveauté me ramène à mon passé, invariablement, me ramène à ce temps de jeunesse. Pas seulement la mienne mais aussi celle de Médor. Car ce chat gris joli a entamé sa carrière de gardien de but en arrêtant les cours d’ancien français que je lui lançais en chiffonnés après les avoir appris.
C’était le temps du cinéma gratuit et des petits beurres trempés dans le thé à la vanille, des photos noir et blanc dans l’escalier. L’époque des cheveux longs, des carrés asymétriques et de l’avenir déjà incertain mais déjà empli d’autant de possibles que de doutes.

… Et que penser de cette version reggae de « every time you go away, you take a piece of me with you » qui passe dans ce café d’Ikebukuro et me renvoie à mes 15 ans, quand ces mots passaient souvent à la radio et que, dans ma vie, il y avait déjà un garçon qui partait alors que j’aurais aimé –tant aimé- qu’il ne s’en aille pas.

11.3.08

Tuesday self portrait (le mensonge)


Grâce aux années de stalinisme (entre autres), on sait que les photos ne disent pas toujours la vérité.
Ainsi, sur cette photo de Yanaka, j'ai l'air :
-seule
-sinistre
-sépia
... Et en fait non !

10.3.08

petites recettes pour une vie (toujours plus) jolie

4 : Remarquer les détails.

On passe si facilement à côté de tout.



Ingrédients :
Des yeux ouverts. Et un appareil photo ou un carnet de croquis en option.

9.3.08

Petites recettes pour une vie (toujours plus) jolie

3 : Ne pas négliger le petit déjeuner.

Cette boisson à la mousse aérienne n'est sans doute pas étrangère au fait que je me réveille avant le réveil.
(Quant aux petits beurres, ils me plaisent encore davantage dans cette version non périssable ! Merci mille fois merci !)



Ingrédients :
Du lait de soja, une banane, un mélange kinako-sésame noir en poudre.

8.3.08

Petites recettes pour une vie (toujours plus) jolie

2 : Manger des fleurs.

Le "c'est maintenant" de Maki quand elle a posé son cadeau devant moi a marqué le début de la saison du parfum sakura.
(Même si je l'avais inaugurée la semaine dernière avec des mochis)

Ingrédients :
Un muffin au sakura. Un mochi au sakura. Un thé au sakura... A décliner à volonté...

7.3.08

Petites recettes pour une vie (toujours plus) jolie

1 : Ne pas oublier de se souvenir

Lire un livre sur la maladie de A. motive pour conserver ses souvenirs.
De la ville tracée à la craie pour y faire du patin à roulettes sur le parking du mess en Guadeloupe en 1974.
Au ciel bleu de la place St Sulpice le 7 février 2008.
Je voudrais tout garder.

Ingrédients :
Le livre d'Olivia Rosenthal : On n'est pas là pour disparaître
"Toute la journée je suis enfermé avec des gens complètement idiots qui ne comprennent rien à ce que j'essaye de leur dire toute la journée à me démener pour sortir de là toute la journée entouré d'incultes qui me demandent de participer je suis plus à l'école dites le nom d'une fleur je suis plus un enfant et aussi le nom d'un fromage et aussi le nom d'un monument camembert c'est pas le nom d'un monument et d'une couleur camembert c'est pas le nom d'une couleur rouge c'est bien et le nom d'une pâtisserie train ce n'est pas le nom d'une pâtisserie faites encore un effort vous allez trouver paris-brest oui c'est ça j'aime pas quand ils me félicitent et le nom d'un pays je me souviens pas travailleurs de tous les pays pas tous juste un citez-en un camembert non je les emmerde moi camembert j'ai pas envie de répondre à leurs questions j'ai pas envie d'être encouragé j'aime pas l'école je les emmerde camembert camembert camembert et j'encule la psychologue de service je l'encule et je l'emmerde et quand je le lui dis elle répond juste que je suis pas gentil et elle continue de sourire pauvre folle"

6.3.08

C'est jeudi !


C'est jeudi et, chaque jeudi, c'est ici que j'envoie mes états d'âme à Madame Gâ...

5.3.08

En ce temps-là (2)

J’ai connu ce temps-là, oui. Ces jours à patienter impatiemment, ces jours à ne penser qu’à ça.
Ce temps-là où la photo était argentique et le tirage n’était pas instantané.
(Et j’aimais ce moment où on ouvre la pochette, où on a les photos en main et où les images coïncident avec le souvenir de l’instant de la prise de vue)

Je les ai enviés, ces gens qui oubliaient tout de ce qu’ils avaient fixé sur la pellicule et qui, chez le photographe, recouvraient la mémoire.
(Moi, je savais toujours exactement ce que j’allais voir, je me souvenais de chaque cadrage, de chaque couleur ou de chaque contraste)

Je ne me souviens plus du jour où j’ai enclenché une pellicule noir et blanc dans mon Leica. Elle y est toujours.
J’aurai –enfin- de vraies surprises en allant chercher mes photos.
D’autant plus que je n’en suis toujours pas arrivée à bout.
(Seule, cette photo de galets ne m’étonnera pas mais, pour autant, elle ne me sera pas moins chère).

4.3.08

Tuesday self portrait (le baiser)


Tant de baisers à Yanaka et, pourtant, je ne saurais m’en lasser.

3.3.08

En ce temps-là (1)

J’ai connu ce temps-là, oui.
(Il m’arrive d’ailleurs, à présent, de dire « il y a vingt ans » pour dater un événement…)

Je suis née à l’autre bout de la terre et il n’y avait ni webcam ni internet pour partager cette joie.
(J’aurais bien aimé savoir comment ma mère racontait à la sienne mes premières semaines, quand elle lui écrivait)

J’en ai collé des timbres, libellé des adresses, accentué l’illisibilité de mon écriture afin de décevoir les mères de mes amoureux qui auraient aimé me lire en cachette de leurs fils, compté les jours que durerait le voyage de ma lettre…

Alors je vais survivre à ces 15 jours qui me privent d’internet, qui me font vivre sans radio mais pas sans nouvelles.
(D’ailleurs, une soirée chez ma fée Clochette me permet d’écrire ici…)